Contrairement à Où vivaient les gens heureux de Joyce Maynard, Apaiser nos tempêtes ne mêle pas douceur et amertume. Ici, c’est bien la dureté et les affres de la maternité qui priment sur la tendresse. Cerise et Anna, deux focalisatrices, deux femmes du même âge, de deux milieux sociaux différents, trahies par leur corps alors que l’adolescence l’habite encore. De cet événement commun, deux chemins se dessinent, fait de choix et de jalons divergents, du début de l’âge adulte aux trente et quelques-unes bougies. Pourtant, ces deux vies parallèles convergent finalement, dans une fin peut-être trop convenue, trop douce alors que tout ce que Jean Hegland donne à lire précédemment est un concentré de douleurs, petits et grands maux s’entrelaçant les uns aux autres en un maelström de catastrophes miniatures. Les ellipses régulières donnent encore davantage de place à ces chagrins qui vont grandissant alors que les enfants prennent de l’âge, bombes en devenir si semblables à la Merry de Pastorale Américaine. L’hôpital hante ce roman, présent en négatif, marquant les diverses étapes de la vie des deux mères, de ces tournants malheureux (et heureux) qui bouleversent leur existence. Apaiser nos tempêtes s’attache donc sans doute trop aux peines, laissant de côté ces bonheurs qui n’apparaissent qu’ici et là, rarement, avant qu’une certaine suavité n’envahisse soudain le roman dans ses cinquante dernières pages. Dans la préface, Jean Hegland explique avoir voulu faire la part belle aux mères et à tout ce à quoi ce terme peut faire référence, à leurs dilemmes et à leur chemin de croix, mais elle semble presque insinuer que les bons moments ne sont que passagers, rares éclaircies perçant les nuages de ces tempêtes.
Une nouvelle fois, la plume de l’auteure, quand il s’agit de décrire la nature américaine, orientale ou occidentale, se pare d’une poésie certaine, capte les rayons du soleil à l’instar de l’appareil photo d’Anna, son héroïne. De Dans la forêt ne subsistent que la présence de familles disjointes et cet amour pour les arbres, ici pommiers fendus par le temps qui ouvrent et ferment Apaiser nos tempêtes. S’y trouvent aussi ces parias, ces inadaptés au monde qui s’y frottent avec réluctance, souffrance, endurant la société bon an mal an. Jean Hegland imagine ainsi des femmes qui sont confrontées aux épreuves de la vie féminine mais aussi à la précarité, aux incendies, au mépris, au deuil, signant un roman engagé et beau, malgré ses défauts.
Merci aux éditions Phébus pour cette lecture.
Jean Hegland – Apaiser nos tempêtes
[Windfalls – traduit par Nathalie Bru]
Phébus
19 août 2021 (rentrée littéraire 2021)
560 pages
23 euros
Ils/elles en parlent aussi : Le murmure des âmes livres. L’œil de Sauron. À l’ombre des livres. Aux bonheurs de Sophie. Des plumes et des livres. Mes aventures livresques. Aire(s) libre(s). Mes p’tits lus. Mon petit carnet de curiosités. Mes échappées livresques. Good books good friends. Des pages et des lettres. Tu l’as lu? Ma toute petite culture. Manon lit aussi. L’île aux 30 polars. Light and smell. Ffloladilettante
Je te rejoins, j’ai eu beaucoup de mal, je n’ai pas ressenti d’attachement envers Cerise et Anna. Si la plume de Jean Hegland me transcende toujours, j’ai été assez décue mais j’en attendais peut être trop.
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Comme toi, j’en attendais peut-être trop…
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Merci pour le lien vers mon avis ! 😊 J’aime la façon dont tu en parles, et à la lecture de ta chronique, je me dis qu’il est vrai que Jean Hegland s’attache « trop aux peines, laissant de côté ces bonheurs qui n’apparaissent qu’ici et là ». J’ai retenu l’éclaircie tardive, mais peut-être que l’émotion que j’ai ressentie était due en partie aux épreuves de la vie.
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Merci à toi 😊 en plus je l’ai lu juste après Là où vivaient les gens heureux et je pense que la comparaison n’a pas été profitable au roman de Jean Hegland… ceci dit je comprends que tu aies été touchée par ces deux femmes !
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Merci de m’avoir citée, c’est adorable ! Moi, j’ai beaucoup aimé ce livre, peut-être parce que je voyais ça comme un récit singulier et pas comme un récit parlant de ce qu’est « une mère ». J’ai bien aimé aussi retrouver le style Hegland, elle arrive facilement à convoquer images et ambiances chez moi. Belle journée !
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De rien, merci à toi de ce paragraphe argumenté ! C’est toujours enrichissant de lire des avis contradictoires 🙂 belle journée !
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La couverture est magnifique !
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Je préférais les couvertures de Phébus d’il y a quelques temps, sorte de toile crème avec des aquarelles superbes dissimulées sous des jaquettes… mais elle reflète bien le livre !
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C’est vrai. Beau week-end Cécile 😊☀️
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Un roman très différent de Dans la forêt que j’ai beaucoup aimé même s’il reste moins fort que son précédent.
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Moins fort et plus déséquilibré je trouve…
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je n’ai pas encore lu « Dans le forêt » alors celui-ci risque de passer à la trappe car je ne sens pas un grand enthousiasme dans ta chronique 🙂
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Disons que je trouve que la répartition des moments de joie est mal faite, ce qui donne l’impression que la fin est assez convenue tandis que le reste est très noir…
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J’ai hésité à l’acheter après une rencontre avec l’auteure… et je tergiverse toujours, je crains de ne pas accrocher, même si le sujet m’intéresse.
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Il y a du bon et du moins bon… la maternité sous (presque) toutes ses formes est donnée à lire, manquent juste les moments de bonheur. Si Où vivaient les gens heureux de Joyce Maynard n’avait pas le côté sociologique présent ici, je trouve qu’il s’attachait à dépeindre plus justement la vie et son mélange doux-amer de peines et de joies – mais qu’en sais-je, je ne suis pas mère après tout…
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je ne l’ai pas fini, en fait,pourtant enthousiaste au début parce que l’écriture est belle, mais trop difficile, trop de négatif pour moi, en forme de complaisance.
je vais tenter prochainement, son 1er livre.
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Trop négatif pour moi aussi, j’ai regretté cette fin trop rose venant contredire tout le reste. Quelques moments de douceur auraient permis de donner une vision en demi-teinte peut-être plus juste.
Je te le conseille, ils n’ont pas grand chose à voir et ce fut un coup de cœur pour moi. Le premier roman chroniqué sur Pamolico 🙂
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Pour ma part, j’ai beaucoup aimé. Pour une fois qu’une auteure aborde la question de la maternité sans tabous !
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Sans tabous, c’est vrai et c’est aussi ce qui m’a plu ! Malgré tout, j’ai regretté que les rayons de soleil ne percent les nuages qu’aussi tardivement, ce qui rend la fin presque convenue…
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A reblogué ceci sur Le Bien-Etre au bout des Doigts.
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J’avoue qu’il m’est tombé des mains …
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Je comprends. J’ai persévéré, mais la succession de drames, avec si peu d’éclaircies (sauf dans les dernières cinquante pages) peut lasser…
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En fait, je ne suis pas arrivée à m’attacher aux personnages ! J’attendais beaucoup de ce roman, j’ai été déçue …
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Un peu déçue moi aussi mais moins que toi je pense… peut-être que ses autres ouvrages te séduiront davantage quand ils seront disponibles en France.
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