Un roman loufoque (L’étrange histoire du collectionneur de papillons, Rhidian Brook)

Rhidian Brook livre ici un roman farfelu, dans le jus de son époque. Il se déroule dans les années 1980, aux États-Unis. Llewellyn Jones, gallois en visite chez sa tante, rencontre Joe Bosco et sa sœur Mary alors qu’il paressait au bord d’une rivière, un livre à la main. Et voilà que l’aventure commence. Joe est vendeur de papillons, affabulateur professionnel et grand fantaisiste. Toute sa famille trempe dans le « business » (y compris le père, absent depuis toujours, plus passionné par l’entomologie que par ses enfants), de sa sœur aînée Isabelle à sa mère (personnage haut en couleur et sans doute trop grossière pour paraître vraie) en passant par la sexy Mary mais aussi par Ceelee, gamine recueillie. Même les deux chiens ont un rôle dans l’entreprise (doberman et rottweiler, ou berger allemand et doberman ? Ce n’est pas tout à fait pareil et pourtant les deux termes sont utilisées…). Le road trip infernal auquel prennent part Mary, Joe et Llewellyn rebaptisé Rip pour l’occasion les emmène sur les routes de différents états, et les font multiplier les rencontres étonnantes et les péripéties fantasques. Les personnages sont tous un peu plus fous les uns que les autres, chacun dans sa veine, peut-être un peu trop. D’ailleurs aucun n’est vraiment sympathique : Llewellyn est trop opportuniste, Edith Bosco, la mère, trop tyrannique, Joe trop fou (bien que touchant), Mary trop instable, Isabelle trop sérieuse. L’histoire est vraiment loufoque, étrange, même si elle tient finalement plutôt bien la route. La construction du roman est à souligner : elle permet au lecteur de rapidement réaliser que tout ne va pas si bien se passer que cela, que le charisme de Joe ne suffira pas toujours à le sortir des situations abracadabrantesques dans lesquelles il se fourre à cause de son bagou à toute épreuve.

Ceux qui aiment les livres terre-à-terre et bien ancrés dans le réel auront sans doute du mal à s’immerger dans le monde coloré que crée l’auteur britannique (dont le livre Dans la maison d’un autre est à l’origine de Cœurs ennemis). Le plus gros défaut de L’étrange histoire du collectionneur de papillons reste sans doute la traduction. Citons notamment le « c’est OK » calqué sur « is it ok », si peu utilisé en français, qui revient très régulièrement. Les maladresses se suivent et se ressemblent, finissent par vraiment agacer. Pourtant Hélène Amalric est un nom connu dans le domaine de la traduction, surtout dans le monde des polars. Mises à part ces erreurs et la langue anglaise qui apparaît bien trop sous le vernis du français, le style de Rhidian Brook est très imagé, très visuel et le film de leurs aventures se déroule sous nos yeux. C’est un roman, comme ses héros, bariolé et baroque. Une fois dans l’imaginaire de l’auteur, on prend plaisir à voir évoluer les personnages mais ce n’est pas une lecture inoubliable pour autant. Trop de digressions, de thèses élaborées sur la « Fausse » et la « Bonne Théologie », toujours à la sauce Bosco.

Une lecture en demi-teinte donc : les aventures des héros intriguent, rendent curieux, mais le fantasque de ce qui leur arrive l’est sans doute trop pour parvenir à toucher le lecteur.

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