Mausolée, Louise Chennevière

Écrire un mausolée à son amour mort, ou plutôt à son chagrin, bien vivant, filant dans les veines jusqu’au cœur, jusqu’aux paupières clignant pour faire fuir les larmes – poésie en prose, phrases en vers, paragraphes presque strophes. Le « je » dit la douleur, la violence des sentiments, de l’évidence du premier regard à l’espoir du dernier regard. Cette mélodie heurtée, bouleversée et bouleversante fait écho à Ça raconte Sarah. Louise Chennevière raconte, à la première personne, un amour tragique, chronologie anarchique, anarchie des souffrances, de la ponctuation contre laquelle chaque phrase, longue, déliée, déferle, comme une vague contre un rocher, virgules et points comme des hoquets entrecoupant deux sanglots, une inspiration brusque, un arrêt sur image, une absence. Ne pas tout dire, pudeur ; éviter de nommer l’indicible, l’immémorable.

Mausolée s’achève avec la rencontre qui détermina des cent cinquante pages précédentes, qui vint chavirer un cœur et un destin. L’autre, lui, l’adoré, est une ombre remplie d’encre, à la fois tangible et impalpable, tissée de souvenirs, de ce qui faisait de lui l’aimé.

Monologue vibrant de remords, d’inachevé, d’amour blessé, broyé, ce roman se lit à l’oreille, les mots roulant contre nos tympans alors qu’ils apparaissent sur la page, musique lancinante et hachée, mélopée entêtante et fracassée par ces pleurs, par cette élégie presque oraison à une bribe de vie perdue, à un fragment de cœur brisé, à une silhouette finalement bien plus fantasmée, rêvée, que regardée.

Louise Chennevière – Mausolée
P.O.L.
21 août 2021 (rentrée littéraire 2021)
160 pages
15 euros

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