« D’un ennui incommensurable » (Faserland, Christian Kracht)

Ce Faserland est une réédition par Phébus d’un classique de la littérature allemande, originellement paru en 1995.

À la lecture de la quatrième de couverture, d’aucuns pensent se plonger dans une sorte de road-trip mais ce n’en est pas un. Il s’agit davantage d’une traversée monocorde de l’Allemagne, des pérégrinations d’un narrateur, soit soûl soit stone mais jamais sobre. Celui-ci est assez détestable, ironique, égoïste et solitaire, électron libre qui navigue d’un groupe à l’autre, un verre à la main (ou une bouteille le plus souvent) se riant des uns, draguant les filles, et horrifié par les autres, tandis que des souvenirs éclosent de temps à autres dans son discours au présent. Rien n’est révélé des raisons pour lesquelles il erre de la sorte, de soirées en bars, de bars en interminables nuits à divaguer jusqu’à finalement atterrir au milieu du lac de Zurich sans que le lecteur n’ait compris tous les tenants et les aboutissants. Il s’exprime de manière décousue, et Faserland est écrit comme il serait dit : beaucoup de discours indirect et indirect libre, de remarques en passant, de digressions d’un alcoolique nostalgique, ou simplement trop imbibé pour penser à autre chose qu’au passé.

Émergent malgré tout les problématiques et paradoxes de la jeunesse dorée allemande des années 90, encore marquée par la guerre, le récit multipliant les références aux nazis et à la séparation Est-Ouest.

Concluons par cette citation extraite du livre lui-même, et le décrivant assez fidèlement : « On dirait du Andreas Vollenweider ou la musique du film Koyaanisqatsi, que j’ai vu à la télévision dernièrement. J’ai éteint au bout d’une demi-heure tellement le film était insupportable. Je veux dire, il ne se passe rien. La caméra survole comme ça des paysages, et tout se déroule en accéléré, et au fond le film n’est qu’un interminable vidéoclip d’un ennui incommensurable. ».

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Merci aux Éditions Phébus et à NetGalley pour cette lecture

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