No man’s land, Oded Ruskin

Un no man’s land ou une bande de terre neutre, là où personne ne s’aventure au risque de trouver la mort. Si Antoine s’y engage, lui, c’est pour trouver la vie.

Sa sœur, Anna, est morte dans un attentat au Caire plusieurs années plus tôt. D’elle, il ne reste plus qu’un dossier l’identifiant comme telle, une lettre adressée à son frère et un sac à main rempli de bibelots comme le sont les besaces des filles. Il a fait son deuil comme il a pu, se rafistolant au gré du vent et des expériences, mais l’ombre de cette archéologue qu’il aimait tant plane toujours sur ses pensées. Quand il aperçoit quelques images de Syrie où des combattantes kurdes sont en arrière-plan, il s’arrête, reste comme sur pause. Ce mouvement de poignet, cette manière d’entortiller ses cheveux couleur de blé en un petit chignon – c’est Anna, ce ne peut-être qu’elle. Incapable de passer outre cette hallucination, d’oublier ces bribes de reportage et cet éclat de lumière blonde dans toute cette poussière du désert, il part, quitte les siens, pour une quête sans fin. De Turquie, il arrivera en Syrie et de causes en conséquences, se trouvera pris dans la lutte contre Daesh, le spectateur sur ses talons.

En huit épisodes de trois-quarts d’heure chacun, No man’s land, réalisée par Oded Ruskin, nous emmène au plus près des combats mais sans jamais s’approcher de la chronique de guerre. Les scénaristes Maria Feldman, Eitan Mansuri, Ron Leshem et Amit Cohen insufflent une humanité hors du commun à ces affrontements qui nous semblent si lointains. Les femmes kurdes amènent à cette série leur détermination et, parfois, un sourire éclaire leurs prunelles dures et obstinées, leur peau café au lait recouverte de sable. Antoine, incarné par un Félix Moati touchant, porte au départ son regard naïf et déboussolé d’Européen sur ces batailles qui semblent si vaines, son regard plein d’espoir qui fouille les visages pour reconnaître quelque part les traits de Mélanie Thierry – sa sœur. Des flashbacks permettent peu à peu de comprendre, apportent des éclaircissements et un peu de douceur à la dureté ambiante et aux corps sans vie. Anna et Antoine, leur passé exploré tour à tour, comme autant de rayons de soleil sur ces paysages aux teintes sépia, poussiéreux et empli de cris guerriers. De l’autre côté du no man’s land qui, au fond, n’existe pas réellement, trois Anglais qui ont rejoint les rangs de Daesh, qui ont une histoire et une douleur. La nuance est donc de mise dans cette série intelligente et bien menée, addictive et pleine d’émotion.

Une saison 2 n’est pas à exclure…

La bande-annonce est visible ici et la série sera diffusée à partir du 26 novembre Arte. Elle est d’ores et déjà disponible sur Arte.tv.

Ils en parlent aussi : Paruna.ru, Les chroniques de Cliffhanger & Co, Sur nos écrans

10 réflexions sur “No man’s land, Oded Ruskin

  1. Ping : S’il n’en reste qu’une, Patrice Franceschi – Pamolico – critiques romans, cinéma, séries

  2. Voilà! Voilà! J’ai bien aimé cette série et dans un même esprit sur la richesse de ce Moyen-Orient et toujours dans la série catastrophe humaine et bêtise humaine (pléonasme…?) en abordant l’horreur et l’absence totale d’intelligence (bis) « Made in USA », je suggère « Baghdad Central », toujours sur ARTE TV et en ce moment en streaming. J’ai beaucoup aime cette tendresse de la part d’Antoine qui le rend bien lourd en mode boulet pour toute la « compagnie »…. La participation de la CIA-US-/MOSSAD est bien vue aussi, tout comme la présence de ces jeunes français désespérés et perdus, pris comme des insectes dans une toile d’araignée kannibale… pris au piège du vide de leurs existences…

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire