La belle époque, Nicolas Bedos

Victor (Daniel Auteuil) a vieilli. Il est devenu pantouflard, prévisible, misanthrope, mal dans son époque, déprimé et déprimant. Ces termes, ce sont peu ou prou ceux employés par sa femme, Marianne (Fanny Ardant), quand elle le met dehors. L’ami de leur fils, Antoine (Guillaume Canet), entrepreneur, vient de créer un tout nouveau concept : Les voyageurs du temps propose à ses clients de vivre le temps d’une soirée, ou d’une journée, à l’époque de leur choix. Dîner napoléonien, soirées des années folles coincé entre Faulkner et Hemingway, conférence de Wannsee : c’est vous qui décidez ! Devant manifestement la vie (ou en tout cas, le succès) à Victor, cet ami lui envoie une invitation, un bon pour le passé. Alors, pour faire renaître un peu de magie, pour revivre ses jeunes et jolies années, pour faire rééclater l’amour (perdu), Victor craque et demande à retourner en 1974. Sa soirée, ça sera celle du 14 mai, soirée où lui et sa femme se sont rencontrés. Au bar La belle époque. Fanny Ardant cède la place à Doria Tillier et le jeu peut commencer…

L’atmosphère, l’ambiance au sein du café, de l’hôtel, des rues reconstituées au sein d’un studio, des vieux taxis qui nous font plonger dans cette décennie entre hippies et étudiantes à bandeau et robe à fleurs ont quelque chose de magique, de « trop », too much permis par les circonstances. Victor sait que tout est factice, ce qui permet à la décoration et aux figurants d’être presque surfaits dans le rétro. Nicolas Bedos confie d’ailleurs que « Ce qui était formidable (…) c’est qu’on a pu fabriquer des nuits et des ‘soleils’ très stylisés, à la limite de l’irréaliste, en y glissant plein de couleurs ». La force de La belle époque, c’est aussi son scénario. Sorte de mise en abîme dans la mise en abîme (dans la mise en abîme), de poupées russes qui en découvriraient une puis encore une alors que le spectateur pensait être au bout de ses surprises, inventif, original, plein d’esprit, il permet en plus de montrer une équipe cinématographique à l’œuvre, les coulisses, les trucs et astuces, la manière de créer les reproductions, les répétitions, l’envers du spectacle. En plus de Victor et du plaisir qu’il prend à passer une soirée dans les années 1970, le film met également en avant la vie d’un scénariste (parfois) perfectionniste et jaloux à l’excès, compagnon de l’actrice principale. On comprend l’Académie des Césars qui a remis à l’équipe la statuette des meilleurs décors et du meilleur scénario original. N’oublions pas non plus de saluer la performance des acteurs – performance qui valut à Fanny Ardant le César de la meilleure actrice dans un second rôle. Et effectivement, on la redécouvre : elle a (presque) abandonné ses chuchotis langoureux et pseudo-mystérieux au profit d’un jeu profond et plein de nuances. Son personnage est tantôt drôle, tantôt agaçant, tantôt touchant, un peu à l’image de celui de Daniel Auteuil, et c’est d’ailleurs sûrement pour cette raison que La belle époque oscille entre drame et comédie. Dès que le spectateur commence à se lasser de l’un des deux genres, il bascule dans l’autre, et ce pendant les 2h que dure la réalisation. « Subtil, pas racoleur », à l’image de l’émotion véhiculée par la chanson de Billie Holliday The Man I Love,d’après Nicolas Bedos, ce film a un petit goût de suranné, de désuet, et son charme est indéniable.

Le festival du film romantique de Cabourg vient de le récompenser du Swann d’Or de la meilleure réalisation.

La bande-annonce est disponible ici.

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