Dans ce roman, Brandon Hobson donne une voix aux Amérindiens encore malmenés par l’Amérique, des années après la Piste des Larmes de 1870 orchestrée par le président d’alors, Andrew Jackson. L’auteur lie ainsi hier et aujourd’hui, les timbres des Echota se mêlant les uns aux autres pour relater un quotidien à la fois banal et singulier, fait de micro-agressions ou de crimes plus graves. Cette famille est toujours en deuil, quinze ans après la mort du fils aîné, Ray-Ray, assassiné par un policier. Maria, la mère, écrit ses pensées pour se relever ; Ernest, le père, fait face comme il peut à la disparition de ses souvenirs et à la confusion qui s’empare de son cerveau atteint de la maladie d’Alzheimer ; Sonja, la fille aînée, apprend à embrasser sa solitude et à fuir ceux qui la tirent vers le bas ; Edgar, le cadet, fume et avale les médicaments qu’il a sous la main, incapable de se défaire de son addiction. L’alternance narrative permet aussi à Tsala, un Cherokee victime de la Piste des Larmes, de s’inviter dans L’écho lointain de nos voix. Peuplé d’esprits, d’ancêtres et de souvenirs qui se manifestent d’une manière ou d’une autre dans le présent incarné des Echota, ce roman est un vibrant hommage aux Nations Premières et à ce qu’elles endurent aujourd’hui encore. Le racisme imprègne ainsi la trame de ce livre, les fibres du papier et la chair de ses héros.
Les phrases de Brandon Hobson sont souvent brèves, énoncés simples et vifs dont la monotonie est parfois rompue par des descriptions du ciel, de la terre, ou par des bribes de contes cherokees. Peu à peu, la factualité parfois gênante de sa plume et les « je » qui s’invitent trop souvent dans les phrases prennent une autre dimension, achevant de redonner une identité aux Amérindiens privés depuis si longtemps d’autodétermination. De même, lentement, les échos unissant le passé et le présent se font plus lancinants et touchent au cœur, indéniablement.
Merci aux éditions Albin Michel pour cette lecture.
Brandon Hobson – L’écho lointain de nos voix
[The Removed – traduit par Stéphane Roques]
Albin Michel (Terres d’Amérique)
17 avril 2024
292 pages
22,90 euros
Ils/elles en parlent aussi : Nyctalopes. La culture dans tous ses états
Il faut passer outre le style ?
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Au début oui, mais on finit par se rendre compte qu’il sert le message du roman.
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Même si la littérature amérindienne m’intéresse, je vais mettre ce titre de côté pour l’instant, peut-être quand il sera en poche ou dans une médiathèque de ma ville, puisque tu n’en fais pas un coup de coeur.
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J’ai mis du temps à voir la beauté du livre et l’intérêt du style, donc c’est peut-être plus sage d’attendre, effectivement.
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C’est un roman qui m’a profondément ému. J’ai adoré ces aller et retour entre le passé et le présent, ces références à la culture amérindienne. Beaucoup d’humanité chez cet auteur. Je suis heureux que tu ais, dans l’ensemble, aimé ce roman. 🙂
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Je comprends qu’il t’ait touché. Si j’ai mis du temps à me faire au style et à ce qu’il traduisait de l’intention de l’auteur, il a finalement fait mouche 🙂
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