Joan Didion relate le désamour d’un couple qui ne s’est jamais vraiment aimé, les tromperies et les mesquineries, les douleurs et l’ennui, jusqu’aux drames, jusqu’à cette saison de nuits. Dans la Californie des années 1940 puis 1950, Everett et Lily partagent un lit puis une demeure, entourés de champs de houblons, de meubles en bois de rose et de soieries, de bijoux et de diamants. Lily a épousé Everett comme une évidence inéluctable, inévitable. Elle s’y est résignée sans trop y croire et a laissé la vie suivre son cours, passive malgré ses aventures, débutées alors que son mari était dans un camp militaire, prêt à combattre pour les États-Unis lors de la Seconde Guerre Mondiale. Ils vivaient alors chez le père d’Everett où habite aussi Martha, sa sœur, névrosée, dépressive, amoureuse, tourbillonnante autant qu’alanguie.
Le temps est à la fois condensé et étiré dans ce livre de 1964, comme annoncé dès les premières pages qui anticipent l’issue d’Une saison de nuits, annoncent la tragédie concluant ce que l’autrice s’applique ensuite à relater – une longue vie faite de compromis et de violations de ces mêmes compromis, des cœurs lourds malgré la légèreté de l’air ambiant, l’argent qui coule à flot et la rivière qui s’écoule doucement en contrebas. Les ellipses succèdent alors aux phrases longues, interminables, entrecoupées de parenthèses, rythmées par des points-virgules, parfois traduites de manière bancale.
Si Joan Didion, dans ce premier roman, offre une véritable chronique américaine, un instantané de la Californie de cette époque, entre multiples références culturelles et ambiance rendue étouffante par la chaleur, moite de l’aube au crépuscule, elle écrit l’ennui et le provoque. La lassitude naît bien vite de ces dialogues rapportés au discours indirect suivis des répliques qui s’enchaînent, encore et encore, et, enfin, de ces énoncés aussi élastiques que ne l’est le temps. Tout se passe ; rien ne se passe. Une compréhension fine des relations humaines et de leur complexité s’esquisse, cependant éclipsée par ce temps à la fois trop dilué et concentré.
Joan Didion – Une saison de nuits
[Run River – traduit par Philippe Garnier]
Le livre de poche
2015 (édition originale : 1964)
360 pages
6,90 euros
Elle est de son temps. Elle n’est pas tout à fait du nôtre. Ça se sent dans son écriture.
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Peut-être est-ce ce qui m’a gênée. J’en jugerai en lisant L’année de la pensée magique !
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J’ai justement lu L’année de la pensée magique, en début de semaine.
C’était ma première lecture de cette autrice que je ne connaissais que pour ses écrits sur le deuil.
Comme Mumu et toi, j’ai constaté la distance qui émane de ses écrits.
J’étais intriguée par ses écrits romanesques mais je note de ne pas choisir ce roman-ci 😉
J’espère que tes prochaines tentatives avec cette autrice seront plus positives.
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Contrairement à toi, j’ai choisi de commencer par l’un de ses romans et je n’aurais peut-être pas dû. En tout cas, j’essaierai ses essais avant de lire une autre de ses œuvres de fiction… j’étais surprise de voir les notes assez mauvaises sur Babelio, quel que soit le titre concerné !
Merci de ton passage et je vais guetter tes retours sur cette autrice 🙂
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Cette lecture n’a pas l’air évidente – autant par la forme que par le fond… On entend parler de cette autrice mais il me faut avouer que je n’avais aucune idée de ce qu’elle a écrit, je découvre un pan de son univers à travers ton article ! Merci 🙂
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En réalité, elle a surtout écrit des récits et des chroniques, en tout cas je pense que c’est ce vers quoi je me tournerai pour avoir un aperçu peut-être plus fidèle de son œuvre… 🙂 merci à toi !
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Ce livre m’a été offert par mon libraire. Je vais le lire sans tarder.
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Peut-être resteras-tu moins à distance et t’ennuieras-tu moins que moi !
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J’ai lu deux de ces ouvrages : L’année de la pensée magique que j’avais aimé et L’année du bleu qui m’avait un peu perdue, deux récits sur le deuil. Joan Didion, récemment disparue, écrivait sur l’intime et même son intime et je trouve que parfois il y avait une sorte de distance froide face aux événements, même les plus douloureux. 🙂
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Oui, c’est la bonne expression, « distance froide », ici aussi. J’ai entendu de tellement bons échos de L’année de la pensée magique que je le lirai sûrement, peut-être pour me réconcilier avec l’autrice, découverte enfin après son décès, effectivement.
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A y réfléchir je pense que l’on peu la comparer par sa « distance » avec Annie Ernaux il me semble 🙂
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D’elle, je n’ai lu que La place qui ne m’avait pas plu mais j’étais trop jeune je pense 🙂
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Peut être car je pense qu’il faut avoir « bourlinguer » livresquement pour en apprécier toute la profondeur…. Enfin c’est mon cas 😉
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J’ai prévu de m’y replonger un de ces jours 😉
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je l’avais noté pour l’époque justement et pour faire la connaissance de la plume de l’auteure, mais je pense qu’il va attendre un peu 🙂
PAL en feu et le mois de l’Europe de l’Est qui approche avec une liste bien massive 🙂
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Franchement pas emballée de mon côté… je ne sais pas encore par quel titre poursuivre ma découverte pour effacer cette mauvaise première impression.
Ah, je vois et je compatis ! Bon courage mais surtout, bonnes lectures 🙂
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