Adaptation de Poupée volée, d’Elena Ferrante, The Lost Daughter met en scène une Olivia Colman qui a délaissé les costumes de The Crown et de The Favourite pour se glisser dans la peau de Leda, une mère ayant laissé filer ses filles, s’étant réveillée trop tard, touchée par la fibre maternelle alors que tout était perdu. Seule en vacances en Grèce, cette professeure de littérature comparée, spécialiste de Yeats et de ses traductions, s’alanguit sur la plage lorsqu’une famille américaine s’installe sur le sable, à grands renforts de cris et de pleurs d’enfant. Elena, la petite fille, émeut bien vite Leda qui la regarde de loin, tâche de rester à distance, le regard blessé et mélancolique d’Olivia Colman laissant deviner une fêlure cachée. La mère de la fillette, Nina, interprétée par Dakota Johnson, est jeune, si jeune, et rappelle à Leda sa propre lutte. Bientôt, des flashbacks brouillent le présent, se faufilent dans la narration, filmant au plus près une Leda rajeunie de vingt ans, Jessie Buckley, déjà sidérante de justesse dans Wild Rose. Seule alors que son mari est en déplacement, seule face à ses deux filles et à son travail de chercheuse habitée par ses textes et par la langue, la jeune mère se débat, s’agace de la dépendance de Bianca et de Martha, déchirée entre son devoir et ses aspirations. C’est ce passé, la jeunesse de l’héroïne, qui confère toute sa puissance à cette réalisation – le premier long-métrage de Maggie Gyllenhaal. Sur le présent plane un malaise, une atmosphère lugubre qui pervertit les rayons du soleil. Cette bande américaine, forcément louche, vortex d’influence, d’emprise, reste mystérieuse mais stéréotypée, sans grande profondeur, là simplement pour permettre aux souvenirs de s’insinuer dans le film, miroir d’hier qui lui permet de se déployer grâce à la douleur qui transforme les traits d’Olivia Colman. The Lost Daughter porte à l’attention un sujet d’aujourd’hui, celui d’une maternité en demi-teinte, d’une impossibilité de se donner corps et âme à ses enfants malgré l’amour ressenti pour eux, d’une impossibilité à exister à la fois en tant que femme et en tant que mère. L’angle choisi est d’autant plus percutant et juste qu’il découle de l’interprétation de quatre femmes : l’autrice, la réalisatrice et les deux actrices. Maggie Gyllenhaal parvient à filmer le malaise grâce à des plans serrés, des corps mouvants et une caméra qui zoome, statique quand il faut pour laisser les actrices faire naître des gros plans au fil de leurs mouvements.
De : Maggie Gyllenhaal
Avec : Olivia Colman, Jessie Buckley, Dakota Johnson
Genre : Drame
Durée : 2h02
A voir sur Netflix depuis le 31 décembre 2021
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En effet – très beau film, d’une sensibilité de ouf, porté par Olivia C. … Peut-être un peu trop schématique pour moi le va et vient entre hier et aujourd’hui (même s’il est souvent quasi « cérébrale »). Il laisse une trace et pose de bonnes questions.
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J’ai trouvé la performance de Jessie Buckley plus remarquable (elle est d’ailleurs en lice pour les BAFTA) mais les talents d’Olivia Colman ne sont plus à prouver 🙂 effectivement, un peu schématique mais globalement pertinent !
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Ah, il est sur ma liste également celui-là et ton avis passionnant me fait dire qu’il va vite falloir que je le vois !
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Merci ! La partie passée m’a beaucoup plu, et ce malgré quelques inévitables maladresses dans la partie présente (après tout c’est un premier film 😉 )
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Et au vu de ton avis, un premier film réussi, ce n’est déjà pas si mal 😉
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C’est sûr 😉
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A reblogué ceci sur Le Bien-Etre au bout des Doigts.
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Dispo sur Netflix ? Il faut que je me le cale. Un film visiblement très remarqué car sélectionné aux Golden Globes, et à la lecture de ton article je commence à comprendre pourquoi.
Je lirai le livre de Ferrante plus tard.
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Ah je n’avais pas vu qu’il était en lice aux Golden Globes ! Tu as vu le palmarès d’ailleurs ?
C’est vrai qu’on n’en a peu parlé finalement et c’est un tort parce que, rien que pour les actrices et le sujet, c’est un long-métrage à voir.
Moi aussi, peut-être plus tard.
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Eh oui mais pas de prix pour Maggie.
Spielberg et Jane Campion se partagent les plus belles statuettes.
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J’ai vu en effet.
Tu dois être content 🙂
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Assez, j’avoue.
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😉
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Bonsoir,
Voilà quelques jours que j’essaie de l’éviter car j’aimerais lire le livre avant de voir le film. Je vais essayer de résister, finir mon pavé, vite commencer Poupée volée pour enfin pouvoir le regarder.
Qui plus est, il est tourné sur la magnifique île de Spetses que je connais bien.
Merci et belle soirée
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Bonjour,
Ah je comprends cette volonté de lire le roman avant de voir l’adaptation… c’est ce que j’ai fait pour Le pouvoir du chien (Savage / Campion) et je n’ai pas regretté ! L’île sert de décor grandiose qui tranche avec l’ambiance… mais je n’en dis pas plus.
Bon courage pour ce marathon livresque et prenez votre temps, je pense qu’on n’a pas fini d’en entendre parler.
Belle semaine
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Il est sur Netflix, j’étais passé à côté, merci pour cette très belle chronique Cécile ! 😊
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Avec plaisir, merci à toi 😊
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Merci Cécile car je ne savais pas
que ce film passait sur netflix. Je vais le regarder au plus vite.
Bon dimanche 🙏
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Je t’en prie 🙂
Belle semaine à toi et bon visionnage !
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Je l’ai vu et beaucoup aimé.
Merci Cécile 🙏
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Merci de ton retour 🙂 Je pensais bien que c’était le genre de film et de sensibilité qui pouvaient te toucher. Tant mieux et à très vite !
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pourquoi pas (et pourtant je voulais rester un peu à distance d’Elena Ferrante, dont le T4 de l’amie prodigieuse m’avait beaucoup déçue!)
mais version film et surtout pour Olivia Colman …. Mais j’attendrai qu’il passe sur C+
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Je n’ai jamais lue l’autrice, tout juste débuté et abandonné son premier tome de L’amie prodigieuse en étant trop jeune.
Olivia Colman est extra, comme toujours, mais c’est à mon sens Jessie Buckley qui vaut vraiment le détour ici.
Je ne suis pas sur que Canal + mette la main dessus (c’est Netflix qui a acheté les droits) mais je croise les doigts 😉
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