Romans : les coups de cœur 2021

Pour bien commencer 2022, revenir sur 2021, ses coups de cœur, ses découvertes grandioses et poétiques, ses lectures poignantes, plus poignantes ici que sur la liste de Noël – regarder en arrière pour mieux avancer. En vous souhaitant d’aussi belles pages et davantage de sérénité que l’année passée !

American Rust, Philipp Meyer

Philipp Meyer, dans son premier roman ici réédité, fait frissonner cette Amérique des laissés pour compte, la fait s’ébrouer. Il la réveille, anime des silhouettes sur fond d’usines rouillées, de mobil-homes miteux, du discours interne traversant son roman comme autant de météores (critique ici).

Un bref instant de splendeur, Ocean Vuong

Dans cette lettre à sa mère analphabète et ne parlant pas anglais, Ocean Vuong rend hommage à ses racines vietnamiennes, à ses premières amours. Poésie et métaphores parent le roman d’une aura évanescente, en font un voyage dont l’onirisme dit la brutalité de la vie, et tout particulièrement la souffrance d’un homme qui ne se sent chez lui nulle part (critique ici).

Climax, Thomas B. Reverdy

Thomas B. Reverdy s’envole en Norvège, celle d’aujourd’hui, des plateformes pétrolières, mais aussi celle d’hier et des mythes ancestraux. De sa plume poétique, lumineuse, il imbrique les niveaux de lecture dans ce roman à la fois traité écologique, « histoire dont vous êtes le héros », quête relevant de la plus pure fantasy et récits de vies banales, d’adultes désabusés et lassés, pleins de nostalgie (critique ici).

Exercice de confiance, Susan Choi

Dans ce roman double qui débute presque comme un campus novel et devient rapidement magistral, Susan Choi crée une mise en abyme brillante et, grâce à elle, questionne les processus de la fiction. La lauréate du Prix Pulitzer 2020 met ainsi en scène l’exercice de confiance à l’œuvre entre un auteur et son lecteur (critique ici).

Les femmes n’ont pas d’histoire, Amy Jo Burns

Les Appalaches sont une nouvelle fois le théâtre de la cruauté des hommes et de la résilience des femmes. Entre la nature d’une beauté glaçante et les ruines de cette civilisation perdue, luttent les héroïnes d’Amy Jo Burns – combat sans fin pour la liberté, pour le droit à la vie (critique ici).

De feu et d’or, Jacqueline Woodson

Jacqueline Woodson crée un chœur mélodieux, envoûtant. La famille Noire-Américaine à qui elle donne vie traverse les âges, ellipses après ellipses, un moment après l’autre, les secrets, les braises et les pépites du titre auréolant De feu et d’or d’une lumière éclatante et inimitable, d’une poésie bouleversante (critique ici).

Furies, Julie Ruocco

En s’appuyant sur la mythologie, Julie Ruocco écrit le passé syrien, rend brièvement au pays sa grandeur perdue, son or d’antan devenu nuit, puis le lie à son présent. Elle mêle deux destins, démontrant ainsi avec sensibilité que l’Humanité ne fait qu’un, que les catastrophes de là-bas sont celles d’ici (critique ici).

Milkman, Anna Burns

Dans l’Irlande du Nord d’Anna Burns, les héros sont anonymes, seuls comptent les rumeurs et les alliances mouvantes, les représailles en attente, et le discours interne de la narratrice – une adolescente qui grandit pendant les Troubles –, mélopée parfois hermétique mais étonnamment envoûtante (critique ici).

La plus secrète mémoire des hommes, Mohamed Mbougar Sarr

Le Goncourt 2021 renouvèle le genre romanesque en proposant une réflexion grandiose sur l’écriture et la littérature, sur l’influence et le palimpseste où écrivent chaque auteur depuis la nuit des temps. Entre colonialisme, histoire littéraire, enquête et quête identitaire, ce roman se dévore porté par une structure d’une labyrinthique lumière (critique ici).

Shuggie Bain, Douglas Stuart

Être un fils, dans toute son abnégation déchirante, voilà ce que relate Douglas Stuart. Son héros, si semblable à l’enfant qu’il fut, aime sa mère de toutes ses forces, la tire hors de l’alcoolisme pour quelques minutes, l’attire vers la lumière et l’espoir, sans renoncer. Jamais (critique ici).

Sidérations, Richard Powers

Un père et son fils, unis face au deuil – deuil personnel et deuil humain. Ils pleurent la mère de Robin, mais aussi la perte de la Terre, ces vies fragiles qu’elle abrite balayées comme soufflées par le vent, ne laissant plus que l’obscurité et l’espoir de ces deux héros, éminemment touchants (critique ici).

Tout le bonheur du monde, Claire Lombardo

Claire Lombardo emmène son lecteur chez les Sorenson, quatre filles et leurs parents. L’amour que ces derniers se portent l’un l’autre les étouffe presque, modèle inatteignable de bonheur, de tout le bonheur du monde. Une douceur à savourer au coin du feu, des albums de famille sur les genoux (critique ici).

Zoomania, Abby Geni

Abby Geni fait se percuter le monde humain et le monde animal, tout un univers sensoriel éclosant peu à peu alors que le bleu du ciel, l’ambre de l’herbe roussie et les odeurs des chevaux envahissent les pages. Engagé, ce roman aborde l’écologie par le prisme de la famille, filtré par la vision poétique et ouverte à la nature de l’autrice (critique ici).

Sans oublier deux poches (et pas des moindres) qui se sont glissés dans les coups de cœur publiés cette année

La route, Cormac McCarthy

D’une intensité rarement égalée, ce roman post-apocalyptique est avant tout le récit d’un amour – celui d’un fils pour son père, d’un père pour son fils. Tous deux, seuls face au monde de cendres, la mer pour horizon teinté de paillettes d’espérance. Un classique qui bouscule et qu’il était temps de découvrir (critique ici).

Idaho, Emily Ruskovich

Ce roman sur la mémoire, l’évanescence des souvenirs, est aussi fragile qu’eux, pages filaments de coton, de barbe-à-papa à l’amertume inexpliquée. Entre présent et passé, le mystère s’épaissit, lambeaux de brume poétique et confondante qui s’estompent pour mieux envelopper les personnages et le lecteur (critique ici).

30 réflexions sur “Romans : les coups de cœur 2021

    1. Merci beaucoup ! Bonne année à toi aussi et au moins autant de belles lectures qu’en 2021 !
      Ses différents niveaux de lecture et son érudition ne l’empêchent pas d’être un vrai page-turner, c’est rare ! Savoure-le bien et au plaisir d’échanger à son sujet (entre bien d’autres).

      J’aime

  1. joli bilan!
    belle année à toi aussi
    je viens d’entamer « La plus secrète mémoire des hommes » j’espère arriver au bout je redoute ce qui s’était passé avec « Boussole » j’avais tellement de post-it, de références : j’avais dû prendre un cahier pour noter tout ce qu’il fallait que j’approfondisse et alors qu’il me plaisait j’avais laissé tomber en route trop d’informations à mémoriser 🙂

    Aimé par 1 personne

    1. Merci !
      Merci beaucoup 🙂
      Ah je vais surveiller attentivement ton blog alors, je suis vraiment curieuse d’avoir ton avis définitif sur la question. Il est effectivement très dense et parfois complexe, mais en ressort une certaine luminosité confondante je trouve. J’avais commencé Boussole il y a six ou sept ans mais jamais fini, j’étais peut être trop jeune et pas assez rouée aux analyses textuelles pour réussir à voir au-delà du marasme 🙂

      Aimé par 1 personne

Répondre à laboucheaoreille Annuler la réponse.