Cœur de lièvre, John Updike

Cœur d’artichaut ou cœur de lièvre

Harry, alias Rabbit, s’enfuit. Pourtant, il semble être un homme d’habitudes. Mais à la moindre contrariété, l’envie d’ailleurs le reprend et il part, abandonne les femmes sur le bord de la route. La première à en pâtir n’est autre que Janice, son épouse et la mère de son fils, enceinte d’un deuxième enfant. Une nuit, par désarroi ou peut-être plutôt par désœuvrement, il prend la voiture et ne revient pas, se réfugiant dans les bras d’une autre pendant quelques mois. C’est peut-être un cœur d’artichaut, fondant pour le moindre minois constellé de taches de rousseur, mais c’est surtout un cœur de lièvre digne de son surnom de Rabbit, chaud lapin et inséminateur de qualité…

Un classique bien monotone

Si ce premier opus de la tétralogie Rabbit Angstrom de John Updike est considéré comme un classique américain, il n’en a pas bien vieilli pour autant. L’ironie des premières pages, prometteuse, finit par se muer en une sorte de tourbillon répétitif et lassant, dans lequel est piégé Rabbit – mais, après tout, n’est-ce pas lui qui l’a créé ? Écrit en 1960, Cœur de lièvre (Rabbit, Run) laisse présager des romans américains à venir – les changements de focalisations et le discours interne qui apparaissent ici et là chez Philip Roth, cette capacité à dépeindre un quotidien finalement assez monotone que l’on retrouve chez Anne Tyler… D’ailleurs, celle-ci se saisit sans doute des travers humains de manière plus sensible et bien plus fine qu’Updike. Ici, les hommes sont tous des coureurs de jupon un peu pathétiques et les femmes, de gentilles petites épouses (parfois alcooliques, parfois dangereuses, certes) ou bien des prostituées en passe de le devenir. Incapable de faire le moindre choix définitif, le héros oscille entre plusieurs voies, le lecteur sur ses traces, agaçant par son indécision, son inconstance et son égoïsme à toute épreuve. L’auteur offre malgré tout quelques beaux moments de poésie – généralement liés à des situations assez prosaïques, voire ridicules – et une véritable plongée dans une époque où il ne faisait pas bon être du deuxième sexe.

John Updike – Cœur de lièvre
[Rabbit, Run – traduit par Jean Rosenthal]
Points
1995 (réédition / date originale : 1960)
360 pages
7,60 euros

11 réflexions sur “Cœur de lièvre, John Updike

  1. Ping : Oh, Canada, de Russel Banks – Pamolico – critiques romans, cinéma, séries

  2. J’ai lu ce roman il y a bien longtemps et j’en gardais peu de souvenirs. Ta chronique m’a permis de me remettre l’histoire en mémoire. J’avais apprécié cette lecture mais je veux bien croire que cela a mal vieilli alors non, je te fais confiance, je ne relirai pas !

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    1. Je me suis pas mal ennuyée alors que pourtant je ne suis pas une inconditionnelle des romans d’action et que les histoires purement relationnelles ont ma préférence… tant pis ! Mais peut être apprécierais-tu de retrouver un livre lu il y a plusieurs années.
      Reste maintenant à savoir si je vais poursuivre la tétralogie pour découvrir les deux titres lauréats d’un Pulitzer !

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