Avant d’écrire une histoire, Thierry Dancourt écrit des atmosphères – des artères saturées de lumière, des sommets enneigés, des cafés bruissant de conversations étouffées, des ruelles d’antan. Cécile, son héroïne, vit à Paris. Suisse, elle a quitté son pays natal pour la capitale, suivant son mari au bord de la Seine, abandonnant ainsi les berges du Lac Léman. Ici et là dans l’année, elle volette vers Genève, Lausanne, renoue avec ses racines et, surtout, en profite pour passer du temps avec Franck, son amant. En cette fin d’après-midi de 1960, ils s’envolent vers les hauteurs, grimpent la route sinueuse, se laissent enfermer par les montagnes, par la nuit noire à peine piquée d’étoiles. Le gothique de ce long passage est saisissant – le sublime de la nature qui avale l’homme, la voiture qui roule vers un destin sombre, la pleine lune qui brille d’un pâle éclat, l’écho de leurs voix dans l’hôtel désert, abandonné, où seuls résident le gardien étrange et Richard, le régisseur, ami de Franck. Pourtant, le mal se cache ailleurs. Le lendemain, un article éveille l’attention de l’amant qui part alors, laissant une Cécile désœuvrée derrière lui. L’ambiance cotonneuse de la chambre et de l’immeuble où habite Richard, la neige qui étouffe les sons et les sensations, silence radio, tout semble anesthésier la jeune femme qui, malgré tout, n’aura jamais appris autant du passé de Franck. Thierry Dancourt rembobine, atterrit à Lausanne, là où les deux amoureux se sont rencontrés, puis revient encore davantage en arrière, à Paris pendant la guerre, mêle complots et filatures, Russie et nazisme. François Vallejo et son Hôtel Waldheim ne sont ainsi jamais très loin – ambiance suisse étrange et mystérieuse en pleine Guerre Froide, hôtel désert ou fourmillant, passé entêtant.
Dans une plume caméléonesque qui se pare des ambiances qu’il dépeint, qui se laisse colorer par leur influence, l’auteur signe un roman aux inflexions historiques, entre policier, poésie et gothique. Il mêle les registres, embrasse les pensées de Cécile puis celle de Franck, parvient à doter d’un suspense délicat son Silence radio teinté d’une lumière inquiétante.
Merci aux éditions La Table Ronde qui en contribuant à enrichir aVoir aLire ont également contribué à enrichir Pamolico.
Thierry Dancourt – Silence radio
La Table Ronde (Vermillon)
8 avril 2021
240 pages
18,50 euros
Ils/elles en parlent aussi : L’atelier de Ramettes 2.1, Lettres d’Irlande et d’ailleurs, Thomas Louis
Ping : Grand Hotel Europa, Ilja Leonard Pfeijffer – Pamolico – critiques romans, cinéma, séries
Ping : L’hôtel de verre, Emily St. John Mandel – Pamolico – critiques romans, cinéma, séries
J’aime énormément ta chronique, tes mots sont très justes et tes ressentis rendent à merveille l’ambiance de ce roman ! Bravo 😊
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Pourtant je l’ai lu aux urgences, c’est dire le talent de l’auteur 😉 en tout cas un grand merci pour ton message, ça me fait très plaisir !
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Ping : Silence radio – Ma collection de livres
Je ne connais pas alors pourquoi pas?
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J’ai été agréablement surprise 🙂
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A reblogué ceci sur Le Bien-Etre au bout des Doigts.
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J’ai aimé l’atmosphère quil a créé. Ce lieu étrange qui fait penser qu’on va croiser des fantômes du passé.
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Exactement !
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