Hillbilly Elegy (Une ode américaine), Ron Howard

Une ode américaineHillbilly Elegy – ou un hommage à cette Amérique profonde des Appalaches, à ces familles de l’Ohio.

Entre déterminisme et ascension sociale, ce long-métrage de Ron Howard disponible sur Netflix s’inspire de la biographie d’un avocat, J. D. Vance. Interprété par Gabriel Basso, le J. D. adulte étudie le droit à Yale, université de l’Ivy League. À la veille d’une journée décisive pour son avenir professionnel, sa sœur l’appelle : leur mère vient de faire une overdose et elle est à l’hôpital. Retour à la case départ pour J. D. qui abandonne sa petite-amie et les dîners chics destinés à lui permettre d’intégrer un cabinet d’avocats renommé pour son stage de fin d’année. Adieu le soleil de la côte est, la clarté dorée et joyeuse qui accompagnait les mouvements de l’acteur. Bienvenue à Middletown, Ohio, où les maisons branlantes arborent fièrement des drapeaux américains tandis que les barbecues crépitent et que les jeunes désœuvrés fument sur les perrons, glacé d’une pellicule lumineuse terne et collante. Là où My Beautiful Boy de Felix Van Groeningen retraçait la descente aux enfers d’un adolescent addict aux amphétamines, Une ode américaine renverse la situation et montre l’ascension d’un fils et la chute de la mère.

Le film repose sur une alternance entre présent et passé, les flashbacks venant donner un contexte aux événements actuels et rythmant la réalisation. Le J. D. de 1997 (Owen Asztalos) est rondouillard, effacé. Il tente de trouver sa place dans le foyer, entre sa mère aux sautes d’humeur impressionnantes et sa sœur, toujours absente. Ses seuls piliers, ce sont ses grands-parents – Papaw et Mamaw les appelle-t-il, à l’image des mots qu’emploie Tiffany McDaniel, l’auteure de Betty, pour évoquer Landon Carpenter et sa femme. Glenn Close prête ses traits à celle qui servira de mère de substitution au protagoniste, qui instaurera des règles et posera des limites – même si elle non plus n’est pas irréprochable. Beverly, une Amy Adams méconnaissable et déchirante, n’est en effet pas en état de se rendre compte que son fils dérive peu à peu vers des contrées dangereuses d’où il ne pourra pas revenir. Les deux actrices sont métamorphosées, leur image se superposant parfaitement aux photographies des véritables Bev et Mamaw que le spectateur découvrira lors du générique. La presse outre-Atlantique reprocha au livre – et au film – un côté caricatural qui ne détonne pas vu de France mais sonne davantage comme un hommage à ces familles relativement peu souvent au cœur des longs-métrages, mais bien davantage des romans : Gallmeister en a fait sa spécialité (Sugar Run, Nuits appalaches, Betty) et d’autres titres tels qu’Ohio mettent également en avant ces populations défavorisées du Midwest.

L’adolescence et ses bêtises, ses erreurs d’aiguillage puis la prise de conscience et la voix de la raison avant le retour et les incontournables pensées obsédantes : est-ce qu’avancer et vouloir échapper à son milieu, ce n’est pas renier qui l’on est ? Tout comme Lucie Quéméner dans Baume du Tigre affirmait par ses dessins que la culture chinoise pouvait ne plus se limiter au patriarcat, J. D. Vance et, à sa suite, Ron Howard, rappellent que progresser et s’élever vers d’autres horizons ne veut pas dire oublier d’où l’on vient et où poussent nos racines. Comme le disait James Baldwin à la Paris Review en 1984 : “you don’t pull up your roots and put them down someplace else” (ou « nous ne déterrons pas nos racines pour les enterrer ailleurs »).

Pour la bande-annonce, c’est ici.

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