Ecoutez nos défaites, Laurent Gaudé

Écoutez nos défaites parce que vivre c’est avancer vers la mort, c’est suivre l’arc de la vie. Écoutez nos défaites parce que les existences se succèdent, les victoires teintées d’amertume s’accumulent, les alliances se nouent et se dénouent. Les hommes sont semblables à des insectes pris dans la grande toile d’araignée que représente l’univers, la fatalité. Pensant avoir leur libre arbitre, être affranchis, ils ne sont en réalité que condamnés à répéter inlassablement le schéma des défaites passées.

Assem est un agent des services de renseignements français, il œuvre à la paix – paix éphémère, sans autre lendemain qu’une nouvelle guerre. Mariam travaille pour l’UNESCO, pour réparer les pillages, les vols, les destructions. Dans ce roman, Laurent Gaudé les fait côtoyer les grands de l’histoire, Hannibal, Grant et Sheman, Hailé Sélassié. Parce que nous sommes tous faits de chair et de sang, d’espoirs et de victoires, toujours teintés de défaites, défaites orchestrées par notre finitude, défaites orchestrées par la vie.

Si les premières pages peuvent laisser perplexe, faire penser à un assemblage de nouvelles qui se seraient retrouvées entremêlées presque par hasard, rapidement on réalise la grandeur de ce roman. Ce n’est pas un objet comme un autre, c’est un de ces livres qui changent une vie – et c’est l’un des premiers que la chance m’est donné de tenir entre les mains. Au-delà de la fiction, de l’Histoire, il porte toutes les vies humaines, passées, présentes et futures, toute la vanité de ces batailles qui se suivent et se ressemblent. La plume de Laurent Gaudé a le journalistique de Sorj Chalandon et le poétique de Mathias Esnard, la beauté des étendues qu’il décrit et la vérité de l’existence.

Peut-être l’’auteur est-il moins noir que je ne l’ai été dans ce billet, peut-être est-ce davantage un message d’amour, de paix et d’espoir qu’il veut véhiculer – parce que la vie passe, le temps s’écoule, et les guerres se poursuivent, au-delà de l’homme, plus grandes que ceux qui les ont initiées.

« Elle regarde les images à la télévision. Tout se mélange. Les époques se mêlent et les cris aussi. »

Les éditions Actes Sud en parlent ici

Crédits photo : la photographie de la statuette provient du Larousse (Pot à onguent en forme de dieu Bès. Faïence polychrome. Art égyptien ; règne d’Aménophis III (XVIIIe dynastie ; 1408-1372 avant J.-C.). [Musée du Louvre, Paris.])

Ils en parlent aussi : Palimpseste, Historique de mes lectures, Les filles de la médiathèque, En lisant, en écrivant, Le monde de Tran, Sur la route de Jostein, Mes mots, mes livres, Domi c lire, Words and peace

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12 réflexions sur “Ecoutez nos défaites, Laurent Gaudé

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