Une indolence lassante (Un été à Rockaway, Jill Eisenstadt)

Jill Eisenstadt raconte l’ennui d’une jeunesse désœuvrée, aux portes de New-York. L’été s’achève à Rockaway, et avec lui les interminables journées à surveiller la plage, les soirées et les amourettes qui durent depuis le lycée, s’émoussant, revenant, repartant au gré de la vie des jeunes. Le groupe d’amis est scindé par le départ d’Alex pour la fac. Ensuite, plus rien n’est pareil, La Rouille, Peg et Timmy se voient moins, se croisent tout au plus, échangeant des vannes et des sourires, un bisou parfois, leur destin se sépare peu à peu tandis qu’ils vieillissent – ou si peu. Alex est le seul personnage qui semble évoluer, transformée par les affres de sa colocation, par ses cours et ses nouvelles préoccupations. À Rockaway, chacun reste plus ou moins lui-même, s’éloignant simplement de ceux qu’il connaît depuis son enfance : Timmy se morfond de plus en plus, perd le peu de joie de vivre qu’il possédait, Peg reste fofolle et spontanée tandis que La Rouille garde son cynisme et son humour acerbe. Ils sautent de péripéties en péripéties, au gré des chapitres, semblant presque immuables, la vie continuant sur le même ton morose. Si les étés sont attendus avec impatience, ils passent avec une indolence qui leur est insupportable mais vite oublié sitôt les mois d’hiver arrivés : tout plutôt que ne rien faire, traîner au magasin, à l’épicerie, voir les journées s’étirer encore plus que pendant juillet et août.

L’auteure mêle les points de vue, réalise de nombreuses ellipses puisque chaque nouveau chapitre évoque un nouvel événement, parfois distant de plusieurs mois de l’événement raconté précédemment. Ce roman, pourtant décrit comme un « livre devenu culte » par son éditeur (Payot-Rivages) est décevant. Alex est le seul personnage attachant, les autres laissant plus ou moins indifférents à cause de cette inconstance temporelle. D’ailleurs, celle-ci empêche aussi une immersion totale dans l’histoire, dans la vie de cette jeunesse désenchantée des années 1980. On se demande quel est le but de ce roman, où on va. Et on referme le livre sans vraie réponse.

Ils en parlent aussi : Librairie des Danaïdes, Les mots de la fin, Kirsteen Duval

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