Un presque coup de cœur. Un roman dense, complexe, construit et intelligent, mais surtout visionnaire. Jonathan Franzen écrit Phénomènes naturels en 1992 et semble dresser un portrait quasi satirique de l’Amérique actuelle et de sa société, ravagée par les entreprises chimiques, envahie de militants anti-avortement, pourrie par l’argent et par l’attrait du pouvoir.
L’auteur écrit donc les destins croisés de Louis Holland, fan de radio, d’Eileen Holland, sa sœur, de leur mère héritière un peu dérangée, de leur père professeur marxiste, mais aussi de Renée Seitchek, étudiante en sismologie, de Philip Stites, simili prêtre anti-avortement, et de tant d’autres vies qui se mêlent au récit, apparaissent puis sortent du cadre. Comme dans Freedom, bien plus dur à lire et bien moins intéressant d’après moi, le thème de l’environnement, de la Terre détruite à petit feu par l’homme, sont évoqués – et plusieurs pages assez moralisatrices sont glissées dans le livre, toujours aussi bien écrites. Comme dans Freedom, l’auteur crée un personnage investi dans cette cause, tiraillé entre argent et éthique, et invente une mère fantasque, instable et un peu folle. Enfin, comme dans Freedom, la famille et les relations familiales parfois compliquées, ont ici une place à part entière. Cette fois cependant, la fresque est vraiment réussie et on voit sous nos yeux se déplier un tableau immense qui semble représenter les États-Unis en leur entier, sans rien oublier.
Franzen est sacré en 2010 « grand romancier américain » par le Times et on retrouve effectivement dans son œuvre beaucoup d’éléments chers à la littérature américaine – ce principe de fresque à la fois familiale et politique tout d’abord, mais aussi ces vies mêlées, cet engagement, cette tendance à la satire et à l’humour caustique, à l’ironie. Son style est imagé, les phrases sont tantôt longues tantôt courtes, mais toujours riches et jamais incompréhensibles.
La construction est intéressante et le rythme du roman est bon, pour ne pas dire excellent. Si on peine à rentrer dans son univers, au bout d’une vingtaine de pages nos difficultés premières sont oubliées. Le narrateur parvient à alterner les points de vue en nous donnant tour à tour l’impression que Louis, puis Eileen, puis Renée, puis à nouveau Louis est le personnage principal. En réalité, ils le sont tous plus ou moins car aucun ne pourrait exister et faire entendre sa voix sans la présence des autres.
Un grand roman, à lire d’urgence.
Ce qu’en dit l’éditeur ici 🙂
8 réponses sur « L’Amérique actuelle d’il y a dix ans (Phénomènes naturels, Jonathan Franzen) »
[…] à découvert. Engagé, ce roman entremêle sujets polémiques et environnementaux à la Franzen (Phénomènes naturels, Freedom), vie familiale si typique de la littérature du nouveau continent à la Andrew Ridker […]
J'aimeJ'aime
[…] dernier. Dans ses thèmes modernes, certains noteront sans doute des résonances entre ce roman et Phénomènes naturels de Franzen par exemple. Femmes fortes, mères célibataires, famille, manifestations, […]
J'aimeJ'aime
J’ai lu « Freedom » de lui. Jonathan Franzen c’est un immense auteur ! Excellente soirée à toi 😊
J'aimeAimé par 1 personne
J’avais moins accroché… plus ardu que Phénomènes naturels, mais une plume inimitable, c’est sûr ! Merci de ton commentaire et une très bonne soirée 😊
J'aimeAimé par 1 personne
oui c’est vrai que c’était un livre complexe un peu comme ceux d’un autre auteur que j’adore : Richard Powers. 😊
J'aimeAimé par 1 personne
Je ne connais que de nom et de réputation 😉
J'aimeAimé par 1 personne
oh tu sais je suis pareil, je découvre moi aussi grâce à vos blogs des tas d’auteurs/autrices que je ne connaissais pas et c’est cool 😉
J'aimeAimé par 1 personne
Oui, c’est top 😉
J'aimeAimé par 1 personne