Lydie Salvayre parvient à emporter le lecteur avec elle dans le musée, dans le déroulé de ses pensées. Elle arrive même à le faire adhérer à ses théories et à le faire réfléchir sur la légitimité des musées, sur la logique illogique d’enfermer des œuvres d’art loin de là où elles ont été pensées, loin des endroits auxquels elles appartiennent, loin de ce qu’elles dénoncent.
Ce livre – pratiquement inclassable, entre l’autobiographie et l’essai, le traité artistique – est également une réflexion sur la vie de Giacometti puisque l’auteure jalonne ses propos d’anecdotes sur cet artiste incompris et vénérant l’échec, le voyant comme seule fin possible. Ceux qui sont intrigués par ce sculpteur peuvent aussi se plonger dans Alberto Giacometti: The Final Portrait, un film qui apporte un éclairage intéressant sur cet homme hors du commun.
Lydie Salvayre accepta de passer une nuit dans le musée Picasso, face à l’Homme qui marche (Giacometti), malgré ce qu’elle pense de ces lieux froids, semblables à des églises pour athées d’après elle. L’œuvre se divise en trois parties : l’avant, le pendant et l’après. La nuit passée face à cette statue l’a bouleversée, l’a angoissée et gênée et c’est ce qu’elle raconte ici. Elle note ses pensées, évoque des souvenirs d’enfance qui ressurgissent, parle de son mari, de ses amis, de ses proches, de la vie et de l’art, explique que tout se résume à « cette marche vers le soir », cette vie qui mènera inévitablement à la mort, allégation confirmant la théorie de Giacometti sur l’échec et illustrée par son Homme qui marche.
Les phrases sont longues, alambiquées et laborieuses pour certaines. Le ton est libre, détaché, presque frivole par moment mais toujours concerné et engagé. Les anaphores sont nombreuses, comme si elle avait écrit ce livre avec pour unique but de convaincre, de rallier à son opinion. Pourtant, cette œuvre est intimiste, autobiographique à bien des égards, et c’est donc plus qu’un simple traité artistique.
Un livre bien étrange donc, mais pas désagréable et encore moins inintéressant.
L’auteure parle de Marcher jusqu’au soir ici.
J’avais acheté un livre sur Dali un peu dans la même veine. Un essai pas évident mais qui m’avais enrichi, une expérience de lecture intéressante en somme. Je songe à ce livre en lisant ta jolie chronique👏. Merci à toi 😉
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Mais de rien, merci à toi de ce commentaire ! C’est exactement ça, une lecture intéressante, et qui part de la vie de Lydie Salvayre pour arriver à l’art et à Giacometti (ou l’inverse d’ailleurs, on ne sait pas bien). J’aime bien le personnage de Dali, qu’est ce que c’était comme livre ? 🙂
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Je te mets le lien pour le livre de Dali, un essais acheté il y a quelques années et j’ai tout de suite pensé à celui-ci en lisant ta belle chronique « La raison du Fou | Dalí et la science » de Vincent Noce. https://www.amazon.fr/raison-Fou-Dal%C3%AD-science/dp/2844265928/ref=sr_1_23?__mk_fr_FR=%C3%85M%C3%85%C5%BD%C3%95%C3%91&keywords=dali+essais&qid=1559228607&s=books&sr=1-23
j’adore Dali, son excentricité ou son grain de folie, son art.. 🙂
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Merci beaucoup, je note ! Et c’est vrai que ses moustaches et sa folie sont irrésistibles 😉
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Je t’avoue que là, ça dépasse totalement mon domaine de compétence et c’est beaucoup trop complexe pour que ça reste un plaisir !
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Haha disons que sa réflexion est intéressante mais c’est vrai que ça ne se lit pas du tout comme un roman !
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Ah une thématique qui me parle beaucoup ! La question des muses est revenue souvent dans mes cours de fac ! Je note
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Réflexion très intéressante sur l’art et les musées, je confirme 😉
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